Ou encore, le fait que l’un des deux conjoints puisse bénéficier de cet abattement empêche-t-il l’autre d’en bénéficier également ? Des questions importantes auxquelles il vient d’être répondu par la voie d’un rescrit fiscal…
Rappelons qu’un rescrit fiscal est une réponse de l’administration à une question qui lui a été posée, par un contribuable ou autre, sur l’interprétation d’un texte fiscal (question de législation), ou sur l’interprétation d’une situation de fait au regard du droit fiscal (rescrit général). Cette procédure est ouverte à tous, que l’on soit un professionnel ou un particulier.
En l’occurrence, la question posée était la suivante :
Question
Le fait, pour un couple, d’être soumis à l’imposition commune pour l’impôt sur le revenu, fait-il obstacle à la détermination individualisée de la plus-value réalisée par chacun des deux membres du foyer fiscal à l’occasion de la cession de titres d’une même société, lorsque l’un peut bénéficier de l’abattement fixe de 500.000 € pour départ à la retraite et l’autre pas ?
Réponse de l’Administration
Ndlr : cette réponse vaut aussi bien pour une SARL que pour une SAS.
En premier lieu, l’Administration rappelle que, pour un couple marié ou pacsé dont les deux conjoints cèdent leurs parts ou leurs actions détenues dans une même société, les conditions pour bénéficier des abattements, que ce soit de l’abattement de 500.000 € pour départ en retraite, ou de l’un des abattements pour durée de détention des parts, s’apprécient au niveau de chaque cédant considéré isolément.
Ainsi, lorsque deux époux prennent leur retraite dans les deux ans précédant ou suivant la cession de leurs titres, chacun peut bénéficier individuellement de l’abattement de 500.000 € mais à condition :
- d’une part, que les deux ensemble aient détenus, de manière continue pendant les cinq années précédant la cession, au moins 25 % des parts composant le capital ;
- d’autre part, que chaque conjoint, pris isolément, remplisse personnellement les conditions pour bénéficier de l’abattement. Chacun doit notamment avoir été dirigeant(e) de manière continue durant les 5 années précédant la cession – Gérant(e) dans une SARL, ou Président(e) ou DG dans une SAS – et avoir perçu à ce titre une rémunération représentant au moins 50 % des revenus professionnels à raison desquels il est soumis à l’impôt sur le revenu).
Par contre, dans le cas où l’abattement de l’un des conjoints serait supérieur au montant de sa plus-value, le reliquat non utilisé ne pourrait pas être reporté et imputé sur la plus-value réalisée par l’autre.
Exemple : deux époux (quel que soit leur régime matrimonial) sont cogérants d’une SARL dont ils détiennent respectivement 20 % et 80 % des parts. Ils vendent leur société pour partir à la retraite et réalisent à cette occasion une plus-value de 200 000 € pour l’un, 800.000 € pour l’autre. Toutes les conditions d’application de l’abattement fixe de 500.000 € étant par hypothèse satisfaites pour chacun d’eux, ils seront imposables comme suit :
- la plus-value réalisée par l’époux ne détenant que 20 % des parts ne donne lieu à aucune imposition à l’impôt sur le revenu (200.000 € – abattement fixe retenu dans la limite de 200 000 €). Néanmoins, la plus-value brute réalisée (plus-value avant application de l’abattement) reste soumise aux prélèvements sociaux de 17,2 %, soit une assiette imposable auxdits prélèvements de 200.000 € ;
- tandis que la plus-value réalisée par l’époux détenant 80 % des parts est soumise à l’impôt sur le revenu sur une assiette de 300.000 € (800.000 € – 500.000 €). En outre, sont dus les prélèvements sociaux assis sur la plus-value brute réalisée (avant application de l’abattement), soit une assiette imposable auxdits prélèvements de 800.000 €.
De même, lorsqu’il ne peut pas bénéficier de l’abattement de 500.000 €n, chaque conjoint peut le cas échéant bénéficier personnellement de l’abattement pour durée de détention (65 % ou 85 %) à condition bien entendu de remplir les conditions pour cela (voir à ce sujet notre fiche pratique).
En conséquence, le fait que l’un seulement des deux membres d’un foyer fiscal peut bénéficier de l’abattement pour départ à la retraite (notamment parce que lui seul était dirigeant), ne prive pas l’autre de bénéficier de l’abattement pour durée de détention sur la plus-value réalisée à raison de la cession de ses propres titres.