Nombreux sont les Gérant(e)s qui font payer leurs cotisations sociales personnelles par leur société. Ceci est tout à fait légal, rassurez-vous, mais reste néanmoins soumis au respect de plusieurs conditions. Voici donc ce qu’il faut faire pour ne pas prendre de risque à ce sujet.
Les conditions de prise en charge des cotisations sociales personnelles d’un Gérant majoritaire par sa société ne sont pas fixées par la loi. Néanmoins, que ce soit par des décisions de justice ou des réponses ministérielles, ces conditions ont été largement commentées au fil des années.
Voici un point complet sur ce qu’il faut retenir à ce sujet.
Sur le plan social
Le régime social des TNS ne s’oppose pas à ce que les cotisations d’un Gérant majoritaire soient prises en charge par sa société, mais tout en précisant que cette façon de faire ne lui est pas opposable.
Autrement dit, ces cotisations restent dans tous les cas personnelles au Gérant.
Il en résulte qu’en cas de défaillance de la société, le Gérant reste le seul débiteur des cotisations.
NB : rappelons toutefois que, depuis la Loi en faveur de l’activité professionnelle indépendante de février 2022, les dettes sociales personnelles d’un Gérant majoritaire de SARL ou d’EURL peuvent désormais être effacées par la commission de surendettement des particuliers (sous réserve bien sûr d’être de bonne foi).
Sur le plan juridique
Comme on l’a dit plus haut, la loi est muette sur les conditions de prise en charge des cotisations personnelles du Gérant par sa société.
Mais selon la justice en revanche, cette prise en charge constitue une rémunération (ou un avantage en nature) et elle n’est donc possible, comme pour le versement de cette dernière, que lorsque les statuts ou une décision collective des associés l’ont autorisée.
Voir nos modèles de décisions des associés à cet égard :
A noter que, dès lors que cette prise en charge est assimilée à une rémunération, le Gérant peut prendre part au vote l’autorisant.
Sur le plan fiscal
Pour le fisc, la prise en charge par une société des cotisations de son dirigeant est là encore assimilée à un avantage en nature, et donc à une rémunération.
En tant que telles donc, ces cotisations sont déductibles du résultat de la société, mais sous les trois conditions suivantes :
- 1 – Leur prise en charge est prévue par les statuts ou approuvée par un PV de l’assemblée générale des associés ou par un PV de décision de l’associé unique (voir ci-dessus).
- 2 – Leur montant, ajouté à la rémunération proprement dite, ainsi qu’aux autres avantages directs et indirects dont a éventuellement bénéficier le Gérant, ne confère pas à cette rémunération un caractère excessif par rapport au service rendu (NB : pour plus de détails à ce sujet, voir notre fiche pratique dédiée).
- 3 – Les cotisations ainsi déduites du résultat de la société sont ajoutées au revenu imposable personnel du Gérant (comme le prévoit l’article 211 du CGI).
Toutefois, notons que, d’un autre côté, les cotisations sociales obligatoires des Gérants majoritaires sont déductibles de leur revenu imposable (à l’exception de la part de CSG non déductible et de la CRDS), dès lors qu’elles ont été effectivement payées dans l’année, que ce soit par le Gérant ou par sa société.
Au final donc, après avoir procédé à cette addition puis à cette soustraction partielle, seules la part de CSG non déductible et la CRDS, prises en charge par votre société, viennent augmenter votre revenu imposable.
A moins que les cotisations déduites du résultat de votre société n’aient pas toutes été effectivement payées à la fin de l’année, ou qu’une provision pour rappel de charges à recevoir ait également été déduite.
Dans ces cas en effet, ces sommes non payées et cette provision doivent également être ajoutées à votre revenu personnel imposable, mais elles ne peuvent pas être déduite de celui-ci dès lors que les montants correspondants n’ont pas encore été effectivement payés au cours de l’année d’imposition.
Exemple : les charges déduites du résultat de la société au nom du Gérant se sont élevées à 10.000 €. Sur cette somme, 7.000 € correspondent aux charges proprement dites (incluant 1.500 € au titre de la CSG non déductible et de la CRDS) et 3.000 € au titre d’une provision pour une régularisation à recevoir. Par ailleurs, sur les 7.000 €, seuls 5.000 € ont été effectivement payés à la fin de l’exercice. La somme à ajouter au revenu imposable du Gérant s’élève donc à 10.000 €, et celle à déduire à 5.000 – 1.500 = 3.500 €. Au final, le Gérant est donc imposable sur 6.500 € (provision de 3.000 + 1.500 € au titre de la CSG non déductible et CRDS + 2.000 € déduits par la société mais non encore payés à la fin de l’année).
Cotisations sur les dividendes
Les cotisations sur les dividendes supportées par les Gérants majoritaires peuvent également être prises en charge par leur société, mais exactement sous les mêmes conditions juridiques et fiscales que ci-dessus (voir notre article à ce sujet).
Cotisations facultatives à des régimes complémentaires (Madelin / PER)
Que ce soit pour une retraite complémentaire, une mutuelle, ou un régime de prévoyance, les cotisations facultatives dues par le Gérant au titre de régimes complémentaires peuvent également être prises en charge par sa société, mais toujours selon les mêmes principes, c’est-à-dire à condition que cette prise en charge soit prévue par les statuts ou par un PV de l’assemblée générale des associés ou par un PV de décision de l’associé unique, et que les sommes déduites à ce titre soient ajoutées au revenu imposable du Gérant.
Là encore en effet, cette prise en charge constitue un complément de rémunération imposable (avantage en nature) à ajouter à sa rémunération de gérance.
Mais de son côté, le Gérant peut déduire de son revenu imposable le montant des cotisations qui ont été effectivement payées dans l’année (même si elles ont été acquittées par sa société), dans la limite des plafonds habituels de déduction.
Fiscalement donc, la prise en charge par la société des cotisations facultatives à un régime complémentaire est neutre en ce sens où elle n’augmente ni ne diminue le revenu imposable du Gérant (sauf si elles dépassent le plafond de déduction).
Sociétés à l’IR
Dans les sociétés à l’IR, les charges du Gérant associé peuvent également être prises en charge par la société et sont déductibles du résultat de celle-ci dès lors que cette prise en charge est prévue par les statuts ou approuvée par l’assemblée générale des associés ou par l’associé unique.
Mais dans les SARL pluripersonnelles, elles doivent être réintégrées au résultat pour déterminer la part imposable revenant à chaque associé, puis déduites, sauf la CSG non déductible et la CRDS, de la part du bénéfice revenant à l’associé pour lequel elles ont été payées.
Exemple : une SARL à l’IR compte 3 associés. Le Gérant possède 51 % des parts, B 25 %, et C 24 %. Le bénéfice de la société s’élève à 24.000 €, après déduction des charges du Gérant, qui s’élèvent elles-mêmes à 6.000 €, dont 1.000 € au titre de la CSG non déductible et de la CRDS. Le bénéfice à répartir entre les associés s’élèvent donc à 24.000 + 6.000 = 30.000 €.- Le revenu imposable de l’associé Gérant s’élève à (30.000 x 51 %) – 6.000 + 1.000 = 10.300 €.
– Celui de l’associé B : (30.000 x 25 %) = 7.500 €.
– Celui de l’associé C : (30.000 x 24 %) = 7.200 €.
En revanche, si cette même société n’avait compté qu’un seul associé, son revenu imposable se serait élevé au bénéfice de la société après réintégration de la part de CSG non déductible et de la CRDS, soit 24.000 + 1.000 = 25.000 €.